La vie à L'Abbaye devait prendre un tour singulièment différent à l'arrivée de celui qui devait incontestablement rester comme le plus dérangé psychologiquement des enseignants qu'ait jamais connu l'université d'Arkham, pourtant réputée pour la bizarrerie notoire de ses professeurs : Alliester Septimus Saedroth, docteur es Sciences Occultes et chasseur de créatures démoniaques en tout genre et sous les formes les plus variées durant plus de vingt-cinq années de sa vie.
Après la mystérieuse visite du batisseur dans sa retraite écossaise (un chateau du XII ème siècle qu'il avait transformé en une véritable forteresse tout ce qu'il y a de plus moderne), le vieil exorciste avait tout mis en oeuvre pour qu'en moins d'un mois il soit prêt à habiter pour une longue période en ce lieu pour le moins reculé. Le moteur de l'antique camion baché, loué dans un village proche, tournait au ralenti tandis que le chauffeur, un petit homme basané et taciturne aux yeux larmoyants aidait le vénérable professeur à décharger les lourdes cantines cadenassées contenant ses effets personnels.
La dernière cantine avait à peine rejoint celles qui s'entassaient près de la grande porte que l'autochtone, manifestement très mal à l'aise, remontait en tout hate dans son épave et disparaissait au plus vite, ne laissant derrière lui qu'un bruit de moteur dont le silencieux n'est plus qu'un lointain souvenir et une fumée noire de mauvais augure quand à l'état dudit moteur.
Après une liste aussi longue que véhémente de jurons, insultes et autres malédictions violement imagées concernant son guide, sa lignée et sa descendance jusqu'à la treizième génération, le très ancien, digne et respectable professeur Saedroth se dirigea vers les portes massives du grand hall et actionna le lourd heurtoir en fer forgé dans l'espoir que quelqu'un lui ouvre, et qui l'aiderait à porter ces cantines jusqu'à sa chambre. Au bout de cinq minutes d'attente, agacé par l'absence de réponse, le vieil Alliester poussa sans grande conviction sur la porte, et eut la grande surprise de la trouver ouverte. Après quelques secondes d'hésitations, le vieil exorciste cria, d'une voix forte et espérait-il assurée, la phrase que toute personne invitée dans un lieu aussi desert et sinistre que l'était le grand hall ne manque pas de lancer à sa première visite :
-Hého? Y a-t-il quelqu'un?
Ven 8 Déc - 20:59